Ses yeux plongent en vertige de sommeil.
Assise sur le palier en bois blanchi de poussière, les jambes libres oscillant dans le vide, les cuisses coincées contre les barres en fer froid torsadant vers le bas. En leur sommet, du bois encore, autrefois triomphant de vernis brillant et aujourd’hui pâli et sans âge.
Elle est seule de silences et d’envies. Derrière elle la fenêtre embuée de pluie, qui laisse entrevoir la fin d’une nuit alors qu’une lumière grise ose à peine le jour. Quelque part dans l’immeuble, un volet claque, doucement.
Un soupir penche son corps, ses mains entourent les bras en fer, sa tête se cale entre deux barreaux. La route vers le bas s’enroule, les marches s’additionnent et se confondent en désordre.
Le monde dort encore, et elle, seule, veille. Peau contre métal, le corps recouvert d’une simple robe en coton chiffonnée de la veille. Sur le palier, entre-deux, elle attend.
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Un souffle entre deux
20 mars 2013
Le printemps impossible
15 mars 2013Après l’hiver vinrent les jours sombres. Le printemps était là, peinant sa charge de pluie aplatie par les vents. Autour de lui la renaissance se préparait, un murmure précédant le changement coulait en flots ininterrompu et annonçait le soleil.
Il s’accrochait à la Seine dérangée dans son lit et menaçant les rives, au givre du matin, aux écharpes entourant les cous et aux gants sur les mains, les yeux rivés sur les bas nuages masquant la lumière grandissante. Il se raccrochait en arrière à l’idée impossible d’une vie sans deuil, au souvenir d’un cheveux roux enroulé à une brosse, au souffle d’un parfum s’exhalant d’un livre au marque page arrêté, posé là, sans bouger, à l’agonie face à une histoire arrêtée au milieu dont il ne connaîtra jamais la fin.
Le monde s’acharnait à vouloir l’oublier et lui s’arc-boutait contre cette érosion, contre les vagues sur la plage effaçant nos marques. Tous les jours, ses pensées l’amenaient à ce bout de terre sous le marbre froid de sa dalle, peutêtre y avait-il quelques fleurs autours, des pâquerettes, un ou deux chardons. Peut-être un oiseau y chantait-il. Il l’espérait, il fallait que ce soit calme et gai, là-bas.
Chaque instant forcait ses pieds à contre sens, s’y rendre voulait dire se rendre, abandonner la lutte, accepter qu’elle ne soit plus. Marcher sur l’herbe derrière l’église, dans ces carrés entourés d’un muret, en haut de la colline, c’était laisser libre son âme des pleurs qu’il retenait, se résigner à la peine, envisager l’existence autrement qu’accompagné d’absence.

Neige en ciel inversé
12 mars 2013Le vent soulevait les flocons apaisés.
Nous marchions lentement, nos pas craquant la route immaculée. Les sons s’étouffaient en résonance de cet écho si particulier de la neige encore neuve. La lune s’y reflétait comme dans un ciel inversé alors que nous avancions, côte à côte, frôlant le froid, rêvant la nuit. La lumière sortait de l’ombre et se posait sur nos âmes, l’univers immense surplombant nos êtres souriait du mystère de l’à venir.
La route était longue, le chemin tournant entre pins et rochers. Nous la connaissions si bien pour l’avoir parcouru pendant les années de l’enfance, nous en connaissions les surprises et détours, nous étions chez nous.
Arriver n’était pas important.
L’essentiel, ce soir-là, était d’avancer. D’un pas égal nous marchions lentement, ensemble.

recyclage
3 mars 2013Kill-Kim #8 est annoncé… (http://youtu.be/M8_aRIIyBUo)
Avant, il faut clôre le #7: ci dessous le texte qui n’aura pas été utilisé :
Je contemble l’eau bleue paresseuse de lumière,
Calme étrange, caresse d’un instant éphémère.
Assise au bord, en nonchalance, j’oublie le temps,
Ma main sur le passé, yeux secs, le coeur séché.
Je garde en rétine la douceur de sa peau,
La beauté de son rire et son corps fendant l’eau.
Mes jambes campées se sont approchées d’elle,
Les doigts serrés de peine, de jalousie, de haine.
Si longtemps désirée, de loin et en silence,
Kim si belle nue, et dans les eaux la danse…
Lorsqu’enfin j’ai osé exister dans ses yeux,
J’ai songé un moment au fait de la sauver :
Les sens en décence, en fin d’un spleen malheureux,
Pour céder, malgré moi, car il fallait m’aimer.