Posts Tagged ‘glossolales’

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Extraits lumineux en joie

18 mars 2012

Elle offre un visage radieux sur la scène. La lumière tombe sur elle et l’enveloppe, s’imprègne de sa douceur et s’élance sur sa voix profonde pour se poser, enfin, au creux de l’âme des spectateurs. C’est un instant unique, qui se figera dans l’esprit d’Hélène, comme une source de joie tranquille au sein de laquelle puiser lors d’instants de vie plus sombres.

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Elle se glisse contre lui en silence sous les draps, se niche contre sa chaleur et s’endort, un bras enroulé autour de lui et le souffle paisible.

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Elle essaie d’occulter la lumière qui coule, ce grand aveuglement des sens tant l’intensité de l’émerveillement est fort. Il serait plus facile de rester la porte fermée, de décider de rester prostrée sur une existence simple et dénudée de sens. Vivre, réellement, intensément, c’est difficile.

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Sophie se sent légère comme une bulle qui s’élèverait dans les airs. Bras repliés autour de ses genoux, elle admire le vent sur l’herbe verte encore mouillée alors que le soleil sort timidement de derrière les nuages. Ses poumons enflent d’une paisible tranquillité, son visage se tourne vers l’avant, les yeux ouverts et heureux. Comme la fin d’un orage, une page est tournée et elle avancera, certainement. Mais pour l’instant, l’immobilité de ce paysage lui suffit tandis qu’en elle un chant rayonne.

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Fathia pouffe sous la table. Autour d’elle les plis de tissus ondulent jusqu’au sol, c’est à peine si elle devine les ombres courant à pas de loup autour de la pièce. A côté, les adultes dansent, chantent, se perdent dans un brouhaha de fête. Il ne faut surtout pas se faire prendre. Elle se roule en boule, immobile, ses cheveux frisés tapissent le sol alors que ses yeux tentent de deviner l’extérieur par la fente entre le tissus et le parquet. C’est une partie de cache-cache. Celui qui s’y colle arrive enfin vers elle et soulève la nappe, le cri rieur et les mots triomphants : A ton tour!

 

 

 

Ces paragraphes sont issus de ma contrainte quotidienne sur le blog du Convoi des Glossolales. Je vous invite à y découvrir de talentueux auteurs.

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extraits de silence

20 février 2012

 

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Du haut de son mur, elle balance les jambes et pose son souffle dans l’horizon. Le soleil est avalé peu à peu tandis que le ciel s’empourpre, des cris joyeux s’envolent à travers les jardins jusqu’au creux de son oreille. Elle est assise, elle regarde une orange à la bouche, ses pieds martèlent le ciment en un rythme paisible.

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Francis a besoin d’être dans un silence de mots. Il faudrait qu’ils cessent d’exister, de tourner dans sa tête, de se heurter aux murs de ses contraintes et de sa fuite en avant… Francis aimerait goûter au luxe du rien, que son esprit se vide et devienne ignorant des autres, du monde, de ce brouhaha persistant qui envahit jusqu’à ses rêves. Seulement voilà, tuer les mots, c’est impossible… Alors Francis écrit. Il tire chaque lettre et phrase hors de lui, patiemment vaillamment, Francis écrit des romans en fleuve d’encre et ainsi petit à petit le calme peut revenir. C’est un équilibre précaire, chaque jour doit comporter une phase d’écriture par laquelle le bruit s’installe sur ses pages et permet au vent du rien de jouer contre les parois de son cerveau.

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Les mots se refusent à elle. Le sens des choses, ce qu’elle aimerait dire. À la place, d’autres mots, ceux des autres, se suivent en un chemin sur lequel le elle avance à contre cœur. Un jour, elle aura la courage de briser son silence, de lever les pieds de ces marques imposées pour enfin être. Elle-même, enfin.

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Elle se réveille d’un long sommeil. Ses yeux interrogateurs ne questionnent plus, elle sait. Sophie repousse ses lourdes boucles blondes et avance loin du passé. Derrière elle, des draps de lavandes et des jours blancs. Devant elle, l’inconnu et c’est bien : Sophie sourie, enfin, et marche droit devant elle.

Ces paragraphes sont issus de ma contrainte quotidienne sur le blog du

Convoi des Glossolales. Je vous invite à y découvrir de talentueux auteurs.

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Extraits un peu paumés

4 septembre 2011
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Le soleil se reflète dans une flaque au creux d’un rocher et l’aveugle un peu. Sophie est accroupie pieds nus dans le sable, ses cheveux sont emmêlés de sable et de sel et de petites algues aussi qui s’y sont nichées lors d’une baignade. Elle est penchée sur cette mare naturelle qui héberge des coquillages et des crevettes, ainsi que de minuscules poissons dont elle ne connait pas le nom. Le vent s’amuse à recréer des vaguelettes et elle se sent la chair de poule. Sophie n’a pas bu depuis hier soir. Elle fiche parfois ses ongles dans ses paumes en mordant ses lèvres salées, elle respire lentement le temps que l’envie passe. Sur cette plage illuminée d’un soleil glacé par le large, Sophie réapprend le manque…

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Dans son cœur s’égrainent des notes sombres et lente cherchant la lumière. Elle s’inquiète de leur résonance faisant jusqu’à vibrer son âme, et du silence ensuite conduisant jusqu’aux larmes. Dans ses yeux, des gouttes de pluies et l’espoir d’un vent soudain, qui grâce à ses bourrasques ramènerait le calme. Dans ses mains le vide des armes, de l’attente et du rien.

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Lentement, au fil des jours, des choix se font, des chemins se forment. Arnaud se sent comme un tricot dont on aurait mal compté les mailles, un peu trop étriqué là ou grand ici. Il oriente sa vie tant bien que vaille de contraintes en obligations, ne sachant comment sortir du désir des autres pour oser les siens.

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Sa mère cache toujours une clé sous une tuile rouge fendue. Cachée derrière un bac à fleur le long du mur de la maison, elle est une garantie pour Agnès qu’une porte lui sera toujours ouverte. Ce soir elle roule trop vite sur l’autoroute, laissant Paris derrière elle et vibrante de l’attente de la possibilité d’un apaisement que lui offrirait cette maison.

 

 

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Extraits sereins

28 août 2011

Ce jour-là, le vent caressait l'herbe en la faisant onduler et cela créait des chemins mouvant que nous regardions avec plaisir. C'était la clé de tout, cette capacité que nous avions à trouver bonheur de choses simples et paisibles. Parfois encore, tu y repenses en souriant, il suffit d'une brise sur ta peau et tout à coup le monde est plus serein.

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Au troisième étage, Gizelle joue de la clarinette. La fille de la voisine est assise par terre et crayonne un dessin de princesses et de fleurs. Gizelle regarde son front penché avec concentration, ses cheveux blonds qui tombent en un rideau enchevêtré et elle se dit qu'elle aimerait bien avoir un enfant à elle… Elle s'arrête de jouer, la petite lève les yeux et attend. Gizelle sourit, et reprend.

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Elle ferme les yeux et inspire infiniment, cette goulée d'air sans début ni fin lui offre un répit entre les désirs des uns et les besoins des autres. Sa poitrine se soulève, lentement, les yeux fermés, les lèvres entre-ouvertes. Elle bloque, le temps se fige, puis elle exale en prenant son temps et en savourant le calme de l'après, un peu comme un orgasme solitaire en lenteur intense présageant d'un sommeil réparateur et égoïste.

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La vie est un long chemin vers soi. Certains se trouvent plus vite que d'autres, ils peuvent ainsi avancer vers nous et nous tendre la main dans notre progression balbutiante.

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Elle s'offre une journée. Ses collègues la pensent avec les siens, et les siens au bureau. Pas de comptes à rendre, pas d'emploi du temps, elle dispose de ce luxe rare de n'avoir rien de prévu. Ce soir elle soufflera ses bougies et ouvrira ses cadeaux, elle suivra la tradition familiale d'entendre une anecdote par année vécue et de boire son schnapps cul sec. En attendant elle savoure le calme d'une terrasse et boit son café brulant à petites gorgées. Plus tard elle reposera son corps dans la chaleur humide d'un hamman avant d'aller se promener dans des jardins de roses, l'âme tranquille, le cœur au repos.

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Extraits courts en mode vacances

11 août 2011
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Ils ont les yeux plein de soleil, les oreilles remplies de vent, le sourire au goût de sel et les cheveux ensablés. Après une journée en pleine mer, la tribu remonte la grève en riant. Les gestes sont fatigués mais heureux.

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Elle s'allonge enfin sur des coussins, enlève ses sandalettes et dénoue ses cheveux. La journée derrière elle s'efface peu à peu alors que le jour disparait et laisse place au vent frais de la nuit.

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Pour que Rosalie cesse de s'ignorer, il faudrait qu'un regard bienveillant se porte sur elle et lui donne existence. 

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La nuit s'est installée avant qu'elle ne se rende compte de l'épuisement du jour.

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Tu trouvais un réconfort à sentir le vent claquer contre ton visage, emmêlant tes cheveux dans le crachin permanent et faisant pleurer tes yeux de fatigue et de froid.

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Des grains de sables se posent sur sa fatigue. A 75 ans, Jeanne s'est allongée sur la plage et regarde la mer vagabonder. Elle a enfin retiré son manteau de culpabilité, sa journée s'est centrée sur elle-même et rien d'autre. Elle sent le poids des ans partir avec le reflux de l'eau. Un sourire aux lèvres, elle attend quelques moments encore, avant de se lever vers le reste de sa vie.

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Elle lève les yeux jusqu'aux étoiles et secoue ses peines de la journée pour emporter ses rires jusqu'aux songes.

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Elle goûte la soupe au bout de la cuillère, se brûle un peu la langue et crie en riant et en pleurant un peu alors que sa mère lui sert un verre d'eau.

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Le rideau en mousseline se soulevait au grès du vent, laissant l'air s'engouffrer joyeusement jusqu'à leurs corps repus et apaisés de sommeil.

 

 

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Extraits en tranches de vie

1 août 2011

Hélène trace des dessins à l'eau sur la table du café. Tous les dimanches matins, sa fourchette croise, décroise, ondule et rondule sur la surface noire. Le liquide transparent trace des sillons qui s'affinent avec la distance. Son geste rappelle les cours de dessins au collège et  les exercices à la plume, qu'il fallait recharger d'encre noire si régulièrement. Hélène a une peau de pêche, une chevelure claire aussi ondulée que fournie. Parfois, son regard se tourne vers la vitre à  la rencontre de la lumière, à la recherche d'un appel qu'elle aurait entendu. Elle n'attend rien, elle est. Je pourrais lui parler mais je la regarde en jetant des miettes de pains sur son œuvre. Elle peste un peu, me sourit. Nous commençons cette journée dans la tranquillité de son petit-déjeuner, et moi en face d'elle avec un simple café noir. Nous savourons ces instants, elle dans le silence, et moi dans la contemplation. Ensuite nos vies reprennent leurs cours, leurs courses, leurs fatigues parsemées de petites et grandes joies, et de tristesses aussi. Nous savons que nous nous retrouverons ainsi le dimanche suivant, et cet instant nous porte jusqu'au prochain.

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Ce soudain silence dans sa vie la déconcerte. L'apaisement attendu se refuse à elle, les sens en alerte elle ne comprend pas. Elle se souvient de la cohue, du bruit, de l'énervement agacé qui devenait le sien, et pourtant aujourd'hui elle sombre dans le vertige assourdissant de l'inexistant. Il n'y a plus de cris, de portes qui claquent, plus de disputes, ce néant la glace elle ne parvient à s'y faire. Doucement, elle réapprend le manque.

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Elle veille sur le sommeil des siens comme une louve. A pas discrets, ses rondes de lits en lits remontent les couvertures, ramassent les doudous et apaisent l’agitation des monstres menaçant la tranquillité des songes. Trois chambres à visiter, trois lits blancs vernis avec soin et bordés de coton sous des plumes légères et chaudes. Enfin, au cœur de la nuit elle ira reposer aussi jusqu'à l'aube. Elle n'est pas gourmande en sommeil. Son réveil sera immédiat au son de petits pieds nus en cavalcades sur le carrelage glacé de leur cuisine, d'orteils en manque de chaussettes et de doigts à peine sortis des rêves qui se refermeront sur des bols de chocolat au lait fumant. Les rires fuseront au-dessus de la table, des rires frais et reposés et présageant d'une journée de vacances sereine. Elle aime les regarder dormir, retrouver l'innocence d'une enfance en confiance et en abandon, elle aime savourer la tranquillité de la nuit en attentant le bonheur de demain.

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Les pieds ancré au sol il reste impassible sous le soleil. A côté de lui une petite fille virevolte le rire au vent. Ils sont là depuis des heures, ils attendent. Dans la cohue du jour, ils veulent saisir un instant fugitif de dentelle et de blanc, un regard entre deux êtres, la promesse d'un rêve avant de retourner à leur quotidien.

 

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Extraits en pluie

22 juillet 2011
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Quand il pleut, elle lâche sa poupée et s'élance pour tromper la chaleur sous les gouttes. Ses nattes virevoltent en cadence alors qu'elle danse. Les bras tendus, les doigts écartés, son chant ravi m'entoure d'une joie innocente et simple.

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Du haut des falaises, elle laisse le vent s'engouffrer dans ses vêtements et créer des voiles derrière elle. Ses cheveux noirs et bouclés volent derrière elle, ses yeux sombres survolent la tempête. Les vagues agitées montent, blanches d'écumes, leurs cimes reflètent un ciel obscur fuyant la lumière. Il n'y a plus de bruit hormis celui du chao, plus de vie autre que la furie qui se déploie devant elle. Elle s'imprègne de cette eau libre et belle, déploie des bras pour mieux sentir le vent avant de partir à regret rejoindre sa vie tranquille et sereine.

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L'enfant regarde la pluie à travers la vitre. Les gouttes se précipitent avec furie contre la paroi, hésitent et se rassemblent enfin en de grande larmes lumineuses coulant jusqu'à la terrasse en pierre rose.

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La radio à fond déferle dans le véhicule. Les basses vibrent le volant et rythment les cahots de la route. Elle peine à garder les yeux ouverts. Plein phares dans l'aube naissante, clim au maximum qui inonde sa peau d'un air glacial, essuies-glaces qui parent inutilement au temps sec mais la font sursauter à chaque passage. La nuit fut trop courte et la route trop longue. Elle est au bout de ce qu'elle peut parcourir, il lui faut trouver un fossé pour y reposer son véhicule et son corps. Elle pousse un chemin de terre, coupe le contact, les phares, elle s'enroule dans la laine douce et s'anéantie de sommeil. Une heure. Deux peut-être, avant de continuer. Elle est en retard là où personne ne l'attend.

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Du fond de son lit, Aude entend le mugissement du vent. Le son du raclement des branches traverse le mur de la maison et vient nourrir ses frayeurs d'enfant. Dehors l'orage gronde et la pluie bat la terre. Elle se sent en sécurité sous sa couette sans être tout à fait rassurée, les éléments qui se déchainent dépassent son entendement. Enfin deux bras aimant viennent l'entourer tandis qu'une voix douce murmure dans ses oreilles. Aude se blottit contre sa maman et se rendort apaisée.

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Il y a comme une éclaircie dans le ciel. Sophie lève les yeux de sa peine et prend le temps de la lumière. Elle inspire cet instant fugitif, sens la fraîcheur de l'apaisement avant de refermer les yeux. Il faudrait que cette journée s'achève, c'est tout.

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L'été glisse d'un jour à l'autre, les ciels gris se succèdent et fondent sur la terre en averses fines et drues. Agnès lève les yeux de son ordinateur et soupire. Son regard se perd dehors à la rencontre d'un ciel dans le ciel, d'une superposition de gris passant de l'ombre à la lumière. Tout à coup, un vent se lève et le soleil illumine une pluie nouvelle, la lumière blanche irradie les toits sous l'obscurité entière de l'orage naissant. Agnès admire cette rencontre entre tout et son contraire, elle s'imprègne de cet instant immense avant de replonger le nez dans ses dossiers.

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Extraits divers

27 juin 2011
Ci-dessous quelques extraits issus de ma contrainte quotidienne sur le blog du Convoi des Glossolales :
 
Ses mains volent sur le clavier avec légèreté, faisant naître grondements de tonnerres et roucoulements amoureux. La scène parait si grande, et elle si petite sous le faisceau serré de lumière blanche perçant l'obscurité, face à ce gigantesque piano qui se plie pourtant à ses moindre gestes. Elle est arrivée humblement et sereinement. La salle de concert s'est tue en un souffle, le temps qu'elle s'asseye et qu'elle ferme les yeux en lançant ses doigts devant elle. Depuis une heure déjà elle domine les notes et offre à son public un éventail d'émotions authentique et pur. Rien n'est imposé. Il suffit cependant de fermer à son tour les yeux pour voyager avec elle. Le temps continue de filer au gré des notes, puis le silence s'impose, d'un coup, comme une douleur. Notre cœur bat alors que nous savourons les dernières résonances donnant sur rien, nous restons immobiles, saisis… cet instant est le meilleur compliment qu'on puisse lui faire. Après il y aura les gens debout, les applaudissements, les bouquets de fleurs et les "encores". La musique existe aussi grâce au néant qui après l'avoir précédée revient sans être plus tout à fait le même.

 

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L'eau froide la réveille. Elle s'était endormie sur les marches à l'extérieur de la gare, dans l'attente. Le poids du voyage et l'atmosphère lourde appelant l'orage avaient fermé ses yeux de fatigue, un sommeil sans rêve l'avait délivré de l'anxiété précédant son retour au village. Sac à main serré contre elle et valise aux pieds, elle avait vogué dans l'insensibilité figeant le temps et ses sens. La pluie l'a sortie de sa torpeur, son chauffeur arrive enfin. Elle déplie son corps, ramasse ses affaires et avance.

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Au troisième étage, Gizelle joue de la clarinette. La fille de la voisine est assise par terre et crayonne un dessin de princesses et de fleurs. Gizelle regarde son front penché avec concentration, ses cheveux blonds qui tombent en un rideau enchevêtré et elle se dit qu'elle aimerait bien avoir un enfant à elle… Elle s'arrête de jouer, la petite lève les yeux et attend. Gizelle sourit, et reprend.

 

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Elle vient tous les samedis, s'assoit au fond de la salle et observe le va-et-vient du café. Ses fonds de poches lui permettent tout juste de s’offrir une limonade, elle ne paye pas de mine avec sa natte dans le dos et ses devoirs de CE1 qu'elle étale soigneusement sur sa table une fois sa boisson terminée. Le patron fait mine de la tolérer. En réalité il sait que s'il la chassait se son établissement elle ne pourrait retourner avant quelques heures dans le petit deux pièces ou vit sa mère avec ses frères. Ici elle trouve une sorte de refuge, elle ne gêne personne. Il a pris l'habitude de l'avoir en salle, de relire ses devoirs et de lui offrir un chocolat chaud pour son goûter. Il la cherche du regard les samedis de vacances qu'elle passe chez ses grands-parents : c'est un peu sa petiote à lui aussi.

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Petits Extraits d’humour coquin

15 juin 2011

Ci-dessous quelques extraits issus de ma contrainte quotidienne sur le blog du convoi des glossolales

 

 

Elle monte les marches en courant, son foulard orange soulevé par le vent. Il la regarde, sans bouger, et l’attend. Souriant.

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De son siège il ne voit que son profil décidé et ses mains gracieuses qui volettent dans ses cheveux noirs afin d'y remettre de l'ordre. Elle est entourée de grâce et de mystère… Il aimerait oser ses désirs, se lever et plonger dans ses yeux noirs, lui adresser la parole et avoir enfin une réponse, un début de rêve ou une désillusion… Comme tous les matins elle se lève une station avant lui et il la regarde partir. Demain, peut-être…

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Les verres tintent. Un rire cristallin résonne. Sandrine se penche en avant l'air conspiratrice tandis que sa voix grave se projette jusqu'à son voisin d'en face. A côté, son stagiaire Mattéo est troublé alors que son regard plonge pour la première fois dans le décolleté en dentelle d'une femme plus âgée que lui et tout autant troublante.

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Il n’y a plus de portes, plus de couloirs à arpenter, de pièces à traverser, plus de pas à faire, de mots à chercher, il n’y a plus que deux corps qui se frôlent, se cherchent peau contre peau au bout de leurs doigts, deux êtres qui se trouvent, se découvrent, qui ont brisé les portes, arpenté les longs couloirs de leurs craintes et fait le chemin, deux âmes entremêlée qui dansent en ne faisant plus qu’un.

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Lorsque Bertrand avait donné rendez-vous à Lili au Da Rosa, il ne pensait pas qu'elle viendrait accompagnée de sa sœur et de son beau-frère. 

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"10 avril 1960 – Mon amour, tu trouveras ci-joint la liste des courses et un billet de cinquante francs. Ne va pas chez le boucher d'en face, j'ai découverts par la voisine qu'il faussait sa balance."

 
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Extraits professionnels (ben quoi?)

29 mai 2011

Madame Evrard claque le tiroir d’un mouvement sec. Remonte ses lunettes sur son nez, essuie la sueur sur son front en agitant un doigt vers les boutons dysfonctionnants de son ventilateur. Ses cheveux grisonnants s’échappent malgré elle du chouchou en velours noir sensé les retenir, ses yeux bleus délavés fixent les papiers épars sur son bureau. Elle essaye de calmer sa respiration énervée avant de les lever sur son interlocutrice. Une petite greluchonne nerveuse au regard fuyant. Yeux et cheveux sombres, peau trop blanche, un peu d’acnée sur les joues. Madame Evrard soupire. Elle était en vacances lorsque cette embauche a eu lieu. Avec son travail à la RH, elle va de surprises en surprises concernant l’inventivité des salariés de l’entreprise…  Elle enlève ses lunettes, ses palpitations se sont calmées. « Mademoiselle, les varices sur le dos ça n’existe pas. Si vous voulez regarder le mariage du Prince William à la télévision demain, posez un RTT ».

 

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Les cris des enfants résonnent au loin. Quelque part dans une cour entre des immeubles, une école abrite leur gaieté quotidienne coupée de sonneries et d’obligations. Le son de leurs jeux vous semble irréel. Vous êtes sortis de vos couloirs, descendus des ascenseurs, au pied de votre gratte-ciel vous tournez vos visages vers le soleil qui peine jusqu’à vous. Une main prolongée de nicotine, une autre au téléphone, vous vous aérez en polluant vos poumons. C’est l’heure… La cohue est suivie de silence, tout à coup vous vous souvenez qu’il vous faut rentrer. Il y a des réunions, un mail à écrire, une question à poser. Votre récréation aussi est terminée.

 

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Parfois Corinne rêve qu’elle est dans les montagnes et qu’elle peut escalader des pans entiers toute seule, ongles dans le roc, yeux dans les failles, poumons dans l’air enivrant des cimes. Elle s’échappe ainsi quelques minutes le visage tendu vers le ventilateur, le temps d’une évasion sereine, avant de reprendre le train train ronronnant des mails et des process.

 

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La boîte fait 40cm sur 50cm et une hauteur de 30 environ. Elle est grise, il y a deux poignées sur les côtés et un couvercle. C’est important le couvercle, Anna va pouvoir arpenter les couloirs pour la dernière fois, jusqu’à la sortie, sans que ses ex-collaborateurs puissent assouvir leur curiosité passive. Anna s’en va. Elle leur manquera une demi-journée, puis une autre intérimaire prendra sa place. L’entreprise continuera à ronronner, les process Kafkaïen se succèderont les uns aux autres, les hommes passent, rien ne change. Anna remplit sa boîte calmement, elle a déjà des choses à faire, son esprit la devance dans les endroits à visiter. Elle part sans dire au revoir, pas besoin, elle laisse derrière une armée prête à faire entendre sa voix, des grains de sable dans la machine trop bien huilée : et si les huileurs retiennent leur geste, alors quoi? Place à la révolte des intérimaires.

 

Des petites tranches de vie au bureau issues de ma contrainte quotidienne sur le blog du convoi des glossolales (http://leconvoidesglossolales.blogspot.com/)